Où étiez-vous vendredi 13 décembre à 16h14? Vous ne vous en souvenez plus? Pas de problème, Google est là pour vous aider à retrouver la mémoire. Un service existe, qui enregistre toutes vos données de géolocalisation et vous les montre, à la minute près, sur une carte. A Mountain View (où siège le géant du net), on appelle ça « l’historique des positions » (location history en anglais), et vous pouvez le consulter sur cette page – à condition d’être connecté à votre compte Google et que l’option ait été activée (ce que vous avez pu faire sans vous en rendre compte lors d’une mise à jour).
Voici, pour l’exemple, une capture d’écran de la carte retraçant tous mes déplacements, vendredi 13 décembre, dans Paris. C’est possible parce que j’ai un téléphone tournant sous Android, le système d’exploitation de Google. Et parce que j’ai installé l’application de messagerie Gmail (qui me logue en cascade sur tous les services Google, dont Maps), à laquelle je suis connecté dès que mon téléphone est allumé en 3G. Grâce à ce mouchard, l’entreprise californienne peut savoir où je suis, en permanence. Regardez plutôt.
Sur cette carte, on peut voir où et à quelle heure je me suis réveillé le vendredi 13 décembre, où j’ai déjeuné, où j’ai travaillé, où j’ai passé la soirée, etc. En zoomant, je peux détailler mon parcours, pour constater que j’étais boulevard Malesherbes, dans le 8ème arrondissement de Paris, à 15h50, puis à 17h14.
Dans l’intervalle, j’ai été flashé plusieurs fois rue de la Ville-l’Evêque. Rue de la Ville-l’Evêque? C’est là que se trouve le siège d’Iliad, la maison-mère de Free. Ce jour-là, j’avais rendez-vous avec un dirigeant de l’opérateur télécoms à 16h, pour une interview. J’y suis resté un peu plus d’une heure. Et j’avais garé mon scooter à quelques dizaines de mètres. Boulevard Malesherbes, donc.
Rien de nouveau, mais personne n’est au courant
Ce service d’historique de localisation n’est pas nouveau. Il existe depuis des années (il descend de l’ancien produit Latitude), mais je viens de le découvrir grâce à un article du site américain Techcrunch. Comment ai-je pu rater ça? Apparemment, je ne suis pas le seul. Je viens de faire un sondage rapide autour de moi: personne n’avait jamais vu cette carte Google émaillée de points et de traits rouges. L’auteur de l’article de Techcrunch, Greg Kumparak, fait le même constat: « je viens de me rendre compte que peu de gens sont au courant, même chez les geeks ».
Ce truc est aussi fascinant qu’effrayant. Fascinant, parce que l’on est immédiatement scotché par la puissance de l’outil. En deux clics, je peux savoir où j’étais il y a trois semaines, à telle heure. Sous la carte, une timeline sur laquelle vous faites glisser la souris indique vos positions successives. C’est ludique et addictif. On passe d’une journée à l’autre et on tente de se remémorer ce que l’on avait fait ce matin-là, ce soir-là, ce week-end-là…
Et, cela va de soi, c’est effrayant. Comme l’écrit Greg Kumparak, « c’est hallucinant de penser au nombre de données que Google est en train de collecter ». On ne découvre pas grâce à cette carte que Google sait tout de votre vie – cela fait des années qu’on le lit et l’entend chaque jour. Mais on le visualise enfin. Votre vie privée, que vous pensiez cachée dans le for intérieur de votre conscience, devient tangible.
Ah, au fait, si vous voulez désactiver ce service, cliquez ici pour savoir comment faire.
Source : Challenges