ATT-big-six-11.06.122

 

 

1. Chine

Il existe peu de statistiques sur les ventes d’armes réalisées par la Chine, mais l’Institut international de recherche sur la paix de Stockholm estime qu’elles représentent environ 3 % des échanges d’armes classiques à l’échelle mondiale.

Pays destinataires
Les pays ayant importé des armes en provenance de Chine au cours de la décennie écoulée ont surtout été des pays en développement au bilan critiquable sur le terrain des droits humains, notamment l’Algérie, l’Angola, le Bangladesh, l’Égypte, la Guinée, l’Indonésie, l’Irak, l’Iran, la Jordanie, le Kenya, la Libye, le Myanmar, le Pakistan, la République démocratique du Congo, le Sri Lanka, le Soudan et le Zimbabwe.

Transferts irresponsables
La Chine continue à fournir des munitions pour armes de petit calibre au Soudan, qui sont utilisées au Darfour par les forces de sécurité et des milices soutenues par le gouvernement. Elle a livré des roquettes et des mines antichars à la Libye à l’époque du colonel Kadhafi. Des munitions, des lance-roquettes, des obus de mortier et des projectiles de mortier ont été vendus au Zimbabwe.

Position vis-à-vis du traité sur le commerce des armes (TCA)
La Chine n’a signé aucun accord multilatéral sur les exportations d’armes, et se montre circonspecte face au traité proposé. Elle a déclaré accepter la nécessité d’un traité reconnaissant les droits fondamentaux garantis par le droit international, tout en ajoutant qu’il est difficile d’évaluer ce type de critères avec objectivité. La Chine est intervenue dans le but de réduire la portée du TCA afin que les armes de petit calibre et les armes légères en soient exclues, de même que les transferts de gouvernement à gouvernement. Les négociations précédentes permettent de penser que la Chine essaiera d’édulcorer le texte, puis introduira une objection majeure à un stade ultérieur.

2. France

La France, l’Allemagne et le Royaume-Uni sont régulièrement classés troisième, quatrième ou cinquième exportateurs mondiaux d’armes classiques en valeur.

Pays destinataires
Les principaux clients de la France incluent Singapour, les Émirats arabes unis, la Grèce, d’autres partenaires au sein de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), la région Moyen-Orient et Afrique du Nord, et des pays francophones. Récemment, la France et la Russie ont inauguré des échanges portant sur la coopération en matière de défense et les équipements navals.

Transferts irresponsables
Si elle se prononce généralement en faveur de critères stricts pour les transferts d’armes, la France fournit tout de même des armements à des pays où il existe un risque substantiel que ceux-ci soient utilisés pour commettre de graves violations des droits humains. Elle a par exemple livré des armes et des munitions à la Libye sous le régime de Mouammar Kadhafi, des munitions et des véhicules blindés à l’Égypte et au Tchad, et des munitions à la Syrie entre 2005 et 2009.

Position vis-à-vis du TCA
L’attitude de la France est progressiste, et correspond globalement à la position commune de l’Union européenne (UE) sur les exportations d’armes, élaborée avec le Royaume-Uni et d’autres gouvernements de l’UE. Elle soutient généralement l’inclusion d’une règle contraignante dans la lignée de la Règle d’or d’Amnesty International. La France préconise l’adoption d’un traité complet et de mécanismes de mise en œuvre robustes, avec notamment l’adoption au niveau national de lois érigeant le trafic d’armes en infraction. Il existe cependant un risque que la France (ainsi que l’Allemagne et le Royaume-Uni) ne cède aux pressions exercées par les États-Unis afin d’affaiblir la protection des droits humains dans le but de ménager la Chine et la Russie.

3. Allemagne

L’Allemagne est régulièrement classée troisième, quatrième ou cinquième exportateur mondial d’armes classiques en valeur. Bien qu’elle ne soit pas membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies, son influence dans le cadre des négociations sur le TCA sera considérable, en sa qualité de première puissance économique de l’UE, et d’acteur de poids aux Nations unies, ainsi qu’au sein de l’Arrangement de Wassenaar, de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et d’autres organisations multilatérales.

Pays destinataires
L’Allemagne est l’un des plus gros exportateurs d’armes de l’UE vers la région Moyen-Orient et Afrique du Nord. D’autres clients importants incluent l’Afrique du Sud, la Grèce, la Turquie et d’autres partenaires au sein de l’OTAN, ainsi que des pays d’Amérique latine et d’Asie.

Transferts irresponsables
Si elle se prononce généralement en faveur de critères stricts pour les transferts d’armes, l’Allemagne a tout de même fourni des armes à des pays où il existe un risque substantiel que celles-ci soient utilisées pour commettre de graves violations des droits humains. Elle a ainsi livré des véhicules blindés au Yémen, mais aussi à la Libye sous le régime du colonel Kadhafi, ainsi que des armes de petit calibre à Bahreïn et à l’Égypte. Elle a aussi fourni des armes et des munitions au Guatemala et aux Philippines.

Position vis-à-vis du TCA
Elle correspond à la position commune de l’UE sur les exportations d’armes. L’Allemagne soutient par ailleurs généralement l’inclusion de la Règle d’or d’Amnesty International. Elle a une attitude progressiste quant à la portée du traité, et est favorable à l’inclusion des armes de petit calibre, des armes légères et des munitions. L’Allemagne insiste sur la nécessité de préciser dans le TCA la responsabilité de chaque État dans le cadre des transactions relatives aux armes. Comme la France et le Royaume-Uni, l’Allemagne est susceptible de céder aux pressions américaines visant à édulcorer le texte du TCA sur les droits humains dans le but de satisfaire la Chine et la Russie.

4. Russie

La Russie est le second plus gros exportateur d’armes en valeur au niveau mondial et exercera une influence majeure lors des négociations relatives au TCA.

Pays destinataires
Ses principaux clients incluent l’Algérie, l’Inde, le Myanmar, le Soudan, la Syrie, le Venezuela et de nombreux pays d’Afrique. L’industrie russe de l’armement est cependant en perte de vitesse dans plusieurs domaines technologiques clés, et le pays cherche des partenaires de pointe et de nouveaux marchés pour de nombreux produits.

Transferts irresponsables
La Russie a fourni des armes à plusieurs pays où elles risquent d’être utilisées pour commettre de graves violations des droits humains. Elle ne publie aucune information relative à ses exportations d’armes, mais 10 % de celles-ci seraient à destination de la Syrie, faisant de la Russie le principal fournisseur d’armes de ce pays. Ces transferts incluent des missiles et des lance-missiles, des missiles antichars pour le tank T72 de fabrication russe, et des avions de combat MIG. La Russie a par ailleurs livré des fusils d’assaut de type AK à la Libye sous le régime du colonel Kadhafi. Elle continue à vendre des hélicoptères de combat au Soudan, où ils sont utilisés pour attaquer des civils au Darfour et au Kordofan méridional.

Position vis-à-vis du TCA
La Russie, comme la Chine, n’est semble-t-il pas favorable à ce que le traité contienne des règles contraignantes sur les droits humains garantis par le droit international, sur le droit international humanitaire et sur le développement socio-économique. Les représentants russes avancent que ce type de règles est interprété de manière subjective et idéologique. Or les principes de respect du droit international relatif aux droits humains et du droit international humanitaire sont reconnus par l’OSCE et l’Arrangement de Wassenaar, dont la Russie est déjà membre. La Russie ne serait par ailleurs pas opposée à un TCA couvrant un large éventail d’armes classiques, comme avec la liste des munitions de l’Arrangement de Wassenaar. Elle estime qu’il faut avant tout se concentrer sur le contrôle des échanges afin d’éviter que les armes ne se retrouvent sur le marché illégal de l’armement, mais le détail de ses propositions et de sa conception de la transparence reste imprécis.

5. Royaume-Uni

Le Royaume-Uni est, avec l’Allemagne et la France, régulièrement classé troisième, quatrième ou cinquième exportateur mondial d’armes classiques en valeur.

Pays destinataires
Ses principaux clients incluent les États-Unis, l’Inde, l’Arabie saoudite, l’Afrique du Sud et d’autres partenaires de l’OTAN. C’est également un exportateur majeur vers d’autres pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, mais aussi d’Afrique sub-saharienne.

Transferts irresponsables
Généralement en faveur de critères stricts pour les transferts d’armes, le Royaume-Uni a tout de même fourni des armes à des pays où il existe un risque substantiel que celles-ci soient utilisées pour commettre de graves violations des droits humains. Par exemple, il a vendu des armes au gouvernement sri-lankais tout en sachant que celui-ci menait une répression violente. Par ailleurs, la législation britannique est actuellement en cours de révision, à la lumière d’éléments attestant que les autorités ont fourni des armes de petit calibre, des munitions et des équipements pour véhicules blindés à la Libye lorsque le colonel Kadhafi était au pouvoir, ainsi que des armes de petit calibre à Bahreïn et des équipements destinés au maintien de l’ordre au Yémen.

Position vis-à-vis du TCA
En 2005, le Royaume-Uni est devenu la première grande puissance exportatrice d’armes à soutenir un traité sur le commerce des armes couvrant les droits humains. Avec la France, il a aidé à établir un code pour l’UE devenu depuis la position commune de l’UE sur les exportations d’armes, le point de départ de la ligne de conduite du Royaume-Uni quant au TCA. Il a par ailleurs été, entre 2006 et 2009, le co-auteur de plusieurs résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies ayant débouché sur les négociations actuelles. Le Royaume-Uni soutient en outre généralement la Règle d’or et a adopté des positions progressistes sur la portée du traité et les mécanismes de mise en œuvre (par exemple en appuyant des mesures robustes en faveur de la transparence). Cependant, comme dans le cas de l’Allemagne et de la France, si une majorité d’États ne se déclarent pas en faveur de règles fortes, le Royaume-Uni pourrait succomber aux pressions exercées par les États-Unis et lâcher du lest en ce qui concerne la protection des droits humains afin de ménager la Chine et la Russie.

6. États-Unis

Les États-Unis sont, de loin, le plus gros exportateur d’armes au monde ; ils sont à l’origine d’environ 30 % des transferts d’armes classiques (en valeur). Leur position sur le TCA est donc déterminante.

Pays destinataires
Les États-Unis fournissent des armes à plus de 170 pays et ont un bilan mitigé en ce qui concerne les suspensions de ventes d’armes en raison de préoccupations liées aux droits humains. Ils ont par exemple restreint les transferts d’armes en direction du Myanmar, de la Chine, du Sri Lanka et du Zimbabwe, ainsi que vers les pays visés par des embargos sur les armes décrétés par les Nations unies. Ils ont cependant vendu des armes à d’autres pays, par exemple à Bahreïn, à l’Égypte et au Yémen, où il existe un risque substantiel qu’elles puissent être utilisées pour commettre ou favoriser de graves violations des droits humains.

Transferts irresponsables
En tant que principal fournisseur d’armes à l’Égypte, les États-Unis ont autorisé la vente d’armes de petit calibre, de millions de balles et d’agents chimiques antiémeutes, malgré la répression violente menée par les forces de sécurité égyptienne contre les manifestants. Le Yémen a également reçu livraison d’armes de petit calibre, d’agents chimiques et de véhicules blindés, et Bahreïn d’armes de petit calibre. Les États-Unis fournissent des armes, une aide militaire et des formations aux forces de sécurité colombiennes, en dépit des atteintes répétées de celles-ci aux droits humains.

Position vis-à-vis du TCA
Depuis octobre 2009, quand le gouvernement Obama a pris le contre-pied de l’opposition au TCA précédemment exprimée par les États-Unis, le soutien américain a joué un rôle crucial dans le processus ayant mené au stade actuel des négociations. Les États-Unis ont déclaré vouloir que le traité fixe les normes internationales relatives au contrôle des exportations d’armements à un niveau proche des mesures en vigueur aux États-Unis. La position des États-Unis sur la protection des droits humains dans le traité est en revanche moins stricte que celle de nombre de ses alliés. Par exemple, les représentants des États-Unis ne souhaitent pas que le traité comprenne l’obligation pour les États d’interdire des transferts d’armes, même s’il existe des éléments crédibles montrant que ces armes pourraient être utilisées afin de commettre des violations graves des droits humains. Le gouvernement américain s’est par ailleurs prononcé contre l’extension du champ d’application du traité aux munitions, affirmant que le sujet est trop délicat et que cela poserait des problèmes d’ordre technique. D’une manière générale, les représentants des États-Unis préfèreraient un document imprécis énonçant des principes généraux invitant à « prendre ces questions en considération » plutôt que des mesures contraignantes fortes.

 

 

source : Amnesty International

 

Rating: 4.3/5. From 6 votes.
Please wait...
Voting is currently disabled, data maintenance in progress.